Slow decoration, slow deco est la nouvelle expression à la mode au point de m’interroger sur ce que cela cache VRAIMENT. À la base, il s’agit plus d’une approche raisonnée et écologique de la déco que d’un style. L’idée est en effet de prendre son temps et de mesurer ses achats afin de se créer un environnement serein. Et j’adhère complètement à cette démarche. Cependant, force est de constater que la slow décoration désigne de plus en plus une sorte de style « déco » avec ses stéréotypes, son uniformisation… et son débarquement dans les chaînes de « fast décoration ». Le marketing serait-il passé par là ?
A travers cet article, je vous propose de réfléchir à cette question : La slow decoration, style ou nouvelle approche de la déco ? Vous me direz ce que vous en pensez.
Autres inspirations
L’esprit minimaliste, design et scandinave de Holly Marder
D’où vient l’expression slow decoration ?
Vous remarquerez que je n’ai pas mis l’accent à « decoration » sciemment, car à la base, c’est une expression anglaise [ Encore ! ]. Cela n’a rien de bien nouveau. Il y a 10 ans quand j’ai commencé à écrire ce blog, on commençait à parler dans les médias de « slow ». L’idée était donc de ralentir. On accolait -et on accole toujours slow à tout et n’importe : slow food, slow life, slow design, slow work, slow sex… alors pourquoi pas à decoration ?
Et puisque nous parlons « franglais », utilisons officiellement l’expression : slow décoration !
Pour un mouvement qui se veut lent, le slow est en pleine ascension. L’urgence climatique a en effet quelque peu accéléré le mouvement. La slow décoration est donc à la mode, sans doute plus pour le meilleur que pour le pire. On va rester positif ! Cependant comme je le disais en introduction, le marketing est passé par là. La grande distribution de décoration et d’ameublement s’en est saisie et nous vend en ce moment du slow à toutes les sauces.
Peut-on vraiment parler de slow décoration, de slow design ? À cela, je dirais que tout le monde est capable de juger par soi-même.
Néanmoins, on peut se réjouir que de plus en plus des marques fassent des efforts, même si c’est souvent du marketing.
remodelista.com – Photo : Tessa Neustadt
La slow décoration californienne selon Jenny Clane
Une autre façon de consommer de la décoration
La slow décoration invite à nous interroger sur notre façon de consommer la décoration et l’ameublement. Comme pour la mode (une des industries les plus polluantes au monde), nous devrions regarder d’un peu plus près les étiquettes des produits « déco » que nous achetons. D’où viennent les objets et les meubles que nous achetons ? Comment sont-ils fabriqués, acheminés ? À partir de quoi sont-ils conçus ?
Ce mouvement propose de prendre son temps en se posant les bonnes questions. Quel est mon besoin réel ? Est-il vraiment nécessaire ? Suis-je influencé par les tendances ? Aurais-je envie de garder cet objet ?
Dans ce processus, l’idée est de miser sur des produits artisanaux, locaux, à défaut des produits fabriqués avec des matériaux recyclés ou recyclables (pas de mélaminé, pas de plastique, pas de matériaux polluants). Une autre piste est d’acheter beaucoup plus de deuxième main, de réparer.
Bref, le principe est de réduire nos achats impulsifs pour un habitat plus raisonné, moins encombré, plus fonctionnel qui nous correspond vraiment.
La slow living selon Nina, fondatrice de la boutique INGREDIENTS LDN.
Un mouvement de pensée
La planète décoration comme l’univers de la mode est traversée par des modes, des courants de pensée qui suivent en fait les changements sociétaux. En ce moment, la période rock’n roll « Je veux du cuir (…) des gros seins, des gros culs. » n’est plus.
Vous m’excuserez d’avoir repris le refrain, très imagé d’Alain Souchon, mais vous comprendrez à travers cette petite phrase que nous n’en sommes plus là. Nous sommes ailleurs : vegan, végétalien, écolo bobo, zen, hipster bardu, fille nature sans un poil… le tout branché à nos écrans, essayant de (sur)vivre dans un monde qui s’accélère et sur une planète qui hoquette. Enfin, nous sommes ce que nous pouvons !
La slow décoration n’est pas qu’une façon de mieux consommer. Elle va de pair aussi avec une façon de vivre et de penser qu’on peut appeler « slow life« .
Lisez les mots de l’influenceuse Beth adepte de cette philosophie et vous comprendrez que la question du style est ailleurs.
Un design réfléchi est la clé pour nous pousser vers de meilleures habitudes et de meilleures façons de se déplacer à travers les rythmes de notre vie quotidienne. Lorsque nous privilégions autant les sentiments et les expériences que le style, nous commençons à créer des maisons qui facilitent notre vie. En ces temps numériques, où l’inspiration visuelle coule en abondance et la pression à suivre peut être intense, une maison plus lente et plus réfléchie offre une alternative en priorisant les sentiments que nous chérissons le plus et en encourageant la vie à laquelle nous aspirons le plus.
Nina, Local Milk
Le revers de la médaille est que je constate que cela engendre une certaine façon de pensée qui devient quelque peu dogmatique.
La décoration slow selon Simone Polk Dahl, mélange d’objets design et vintage.
De la pensée à la décoration
Pour Beth et beaucoup d’autres, la maison, l’intérieur devient un sanctuaire, un refuge, permettant de se reconnecter avec soi-même, d’être dans son cocon, sa bulle, entre soi.
Pour cela, on applique les principes du minimalisme, et on met un peu ce que l’on veut avec. Une pointe hygge à la scandinave. Un peu de bohème pour le côté cool. De l’hippie chic et ethnique aussi pour l’artisanat. Du rustique, campagne pour les matériaux naturels, bruts et durables. Du japandi, un mélange d’esprit design scandinave, de wabi sabi et de minimalisme japonais.
Bizarrement, mélangez tout ça et vous obtiendrez quelque chose qui oscille entre tout ça dans des tonalités neutres et douces… et qui s’uniformise. Cela aboutit à une sorte de « style » déco codifié, alors que le style ne devrait rien à voir avec cela. Pour moi, on peut très bien être « slow » et avoir un décor indus, rustique, ultra-coloré…
Voilà, voilà, c’est ce que je ressens en ce moment face à ce mouvement, auquel j’adhère pourtant complètement. J’ai cette impression que « slow décoration » est devenu un style, alors que pour moi, ce n’est pas un style.
N’hésitez pas à exprimer votre point de vue.
sophie
8 juin
La slow décoration, une tendance qui nous pousse à repenser notre manière de décorer nos espaces. Mais est-ce vraiment un style ou une simple approche de consommation ? Je ne sais pas !
FATIHA
17 octobre
Que dire, je ne passerais pas par 36 milles mots…le *faites comme ceci ou comme cela, ceci est mieux que cela* , nous l’avons connus depuis que le monde est monde. c’est *suivez nous et laissez vous faire vous verrez c’est mieux nous sommes des milliers , pourquoi pas nous rejoindre !!!* nous connaissons la chanson…le marketing rafle tout sur son passage et n’en aura pas assez, tout se vend de nos jours, et le produit qui a le plus de succès est l’arnaque. misère !!!
Mickaël
3 mai
Merci pour cet article et pour la vision plus globale qui est donnée, sur ce phénomène de société. Difficile pour moi d’avoir un avis définitif sur les principes de « slow life ».
La démarche du départ me paraît bonne en se concentrant sur nos besoins et en faisant attention à notre impact environnemental (la nature bien sûr mais également les personnes que nous faisons travailler avec nos achats). Bref, selon moi, en devenant un conso-acteur et non plus un simple consommateur.
Reste que le message devient effectivement une mode juteuse, pour le marketing des entreprises se voulant « moderne et responsable ». Le message initial devient alors un argument de consommation comme un autre.
Malgré tout, je sens autour de moi ce changement. Cette envie de ralentissement, cette idée que le progrès devient, aujourd’hui, parfois plus étouffant et effrayant que motivant. La communication se perd dans un monde où pourtant tout est connecté, nous perdons de vue notre famille et nos passions, dans une époque où le temps de travail n’a jamais été aussi faible. Et si finalement l’abondance que nous connaissons était le principal moteur de cette envie de revenir vers soi.
Seul l’avenir confirmera si c’est une mode ou un changement de pensée. Voyons si nous autres, petits hamsters, pouvons quitter notre roue.
Julie
28 mars
Hello Clémence,
Et si la clef était justement de ne pas se poser trop de questions?
Je te dis ça, mais je me suis posée les mêmes questions il y a quelques années ^^ Pour la question de tendance, je fais la différence entre minimalisme qui est pour moi une « tendance » / un style à part entière (et dans mon quotidien, une manière de vivre, mais ça c’est autre chose) et la slow déco. Le minimalisme a évolué avec le temps, il a des codes assez bien définis. On va s’intéresser aux matériaux, à la fonctionnalité, etc. Le slow est plus dans la démarche. Une démarche de sens bien souvent. Une démarche éducative aussi. Dans les 2 cas, j’y vois une invitation à voir plus loin que le bout de son nez. Et ça, c’est chouette.
Je me suis demandée en commençant à écrire autour de ces 2 thématiques sur mon blog ce que je voulais véhiculer comme message. Et si j’arrive à aider mes lecteurs à trouver un équilibre dans lequel ils se sentent bien à la maison, c’est le principal.
Je te souhaite un bon weekend. A très vite 😉
Sophie
27 février
Oui, merci pour cet article qui reprend bien les principales questions soulevées par cette tendance.
Effectivement, si le réchauffement climatique et toutes les problématiques environnementales peuvent au moins amener à transformer nos habitudes et à nous libérer un peu de la pression de la consommation, ce sera un bienfait.
Pour ma part, j’en ressens vraiment des bénéfices, et avoir des modèles (comme sur ce blog !) de déco qui sont davantage des façons de vivre que des injonctions esthétiques a contribué à des véritables changements de ma consommation , à , entre autres et par exemple, ne plus vivre des espaces qui pourraient être considérés comme « réduits » relativement à d’autres, comme une frustration mais comme un avantage sur beaucoup d’aspects… Evidemment, il ne faut tomber dans l’excès inverse et, comme cela est très bien dit dans l’article, ni dans le dogme, ni l’artifice , mais plutôt engager une réflexion écologique plus large et positive !
La déco peut en être le commencement…
Sophie
Clémence
28 février
Bonsoir Sophie,
Merci d’avoir pris le temps d’écrire ce long commentaire sur la slow décoration.
Je suis heureuse d’inspirer des personnes.
Je suis loin d’être parfaite. C’est amusant de vous lire, car en tenant ce blog, je chemine autant que je vous inspire quelque part. Cela m’oblige à regarder ma propre façon de consommer et d’aménager notre intérieur.
Bon weekend,
Clémence
Renaud
24 février
Merci Clémence pour cet article. Je me retrouve personnellement dans ton point de vue, et j’ai vraiment l’impression que le “slow living” est la “slow decoration” sont devenus un style, une esthétique plutôt qu’une philosophie de vie (tout comme le minimalisme, qui est lié, et qui a subi le même traitement). Comme tu l’as si bien remarqué, c’est devenu une tendance, ce qui fait que le concept perd un peu son sens. Changer tout son intérieur pour suivre la “mode slow living” est un peu contraire à l’idée qu’est censée représenter ce concept.
On peut très bien pratiquer le “slow” living dans un intérieur coloré et décalé (ou n’importe quel autre ‘style’) selon moi, l’important étant d’aimer et de chérir chaque meuble et chaque objet que l’on possède, et surtout de ne pas en changer à chaque saison. Bien sûr, tout le monde évolue, et nos goûts aussi. On a parfois bien besoin d’un petit coup de frais dans son intérieur. Pour rester dans cette démarche de “slow living”, pourquoi ne pas revendre les meubles ou objets qui ne nous rendent plus heureux, ou même les troquer, plutôt que de les amener directement à la décharge ou les laisser s’accumuler dans le grenier ? Peut-être que ce vase offert par belle-maman et que l’on n’a jamais aimé fera le bonheur de quelqu’un !
C’est un mode de vie qui je pense est difficile à pratiquer dans notre société actuelle fondée sur le consumérisme (l’adoption de la tendance “slow living” par les grandes marques en est la preuve), et qui donne parfois l’impression d’être un peu sectaire. Je pense toutefois que chacun peu adapter le concept à ses propres besoin, et adopter, à son rythme, un mode de vie plus “slow”.
Merci encore pour cet article très intéressant !
Renaud